A lire dans le monde du 20/11/12
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Le tournant social-démocrate de François Hollande relance le débat sur les liens avec le MoDem.
L'inquiétude grandit au sein de l'aile gauche du PS. Ecartés de la direction socialiste, les amis d'Emmanuel Maurel redoutent de plus en plus
un changement d'alliance du PS de la gauche vers le centre. "Au moment où la majorité connaît des tensions avec nos alliés écologistes et communistes, il ne faudrait pas que certains, au PS,
préparent un renversement d'alliance avec le MoDem", prévient le vice-président du conseil régional d'Ile-de-France. Une crainte renforcée par la recomposition prévisible de la droite sur fond
d'élection à l'arraché de Jean-François Copé, mardi 20 novembre.
En cause, le tournant clairement social-démocrate pris par François Hollande, dans la foulée du pacte de compétitivité de Jean-Marc Ayrault et du rapport Gallois.
Autant d'étapes saluées par le MoDem de François Bayrou, mais critiquées par leParti communiste, le Parti de gauche, et un pan d'EELV. Pour la sénatrice deParis Marie-Noëlle Lienemann, proche de
M. Maurel, "le nouveau discours de François Hollande rend possible un rapprochement avec le centre. La preuve, François Bayrou a été le premier à l'applaudir".
PROXIMITÉ IDÉOLOGIQUE
Face à une droite qui semble de plus en plus se radicaliser, la question d'une main tendue socialiste au centre se pose pour deux raisons principales. La première,
programmatique, découle de la proximité idéologique qui a toujours existé entre M. Bayrou et M. Hollande, héritier de Jacques Delors qui a défendu l'idée d'une "troisième force" française née de
l'alliance entre socialistes et démocrates-chrétiens.
Dans un entretien au Parisien Dimanche, le 18 novembre, le leader du MoDem, qui a appelé à voter pour le candidat PS au second tour de l'élection présidentielle, a
de nouveau soutenu le "cap" engagé par le chef de l'Etat, jugé "courageux" et"convaincant".
TACTIQUE
La seconde raison est davantage tactique : du fait du changement de discours et de politique de M. Hollande, la majorité présidentielle peut-elle, à terme, rester
la même qu'au lendemain du 6 mai ? Eva Joly et Jean-Luc Mélenchon, les deux candidats qui avaient appelé à voter pour lui au second tour, sont aujourd'hui très critiques ; le Front de gauche est
passé du soutien sans participation à l'opposition systématique, notamment au Parlement ; et les écologistes enchaînent les coups d'éclat.
Si M. Bayrou rappelle ne pas "appartenir à la majorité de gauche", certains, au MoDem, rêvent de relancer ce parti affaibli en coopérant avec le gouvernement au
sein d'une grande coalition démocrate, comme son vice-président, Jean-Luc Bennahmias, qui estime que "bientôt se posera la question de savoir quelle est la vraie majorité". Les voix centristes
pourraient par ailleurs être utiles aux socialistes pour le vote de textes législatifs sensibles, comme le droit de vote des étrangers ou le mariage pour tous, et la préparation des élections
municipales de 2014.
"DES RELATIONS CLAIRES"
Des signes semblent aller déjà dans le sens d'un plus grand dialogue, comme la réception à l'Elysée, le 14 novembre, lendemain de la conférence de presse de M.
Hollande, d'une dizaine d'élus MoDem par Bernard Poignant, conseiller proche du chef de l'Etat. Ou la démarche du président du Sénat, Jean-Pierre Bel, qui a récemment chargé la sénatrice MoDem
Jacqueline Gourault, fidèle de M. Bayrou, de coproduire une proposition de loi sur le statut de l'élu avec le socialiste Jean-Pierre Sueur.
Pour l'heure, au PS, pas question d'évoquer un rapprochement. "Harlem Désir a pour seule tâche d'établir des relations régulières et claires avec nos partenaires
radicaux et écologistes, mais aussi, quand c'est possible, avec le PCF et le Parti de gauche", explique son porte-parole, David Assouline, ajoutant néanmoins que les socialistes sont disposés à
"discuter avec tous ceux qui peuvent serassembler, notamment au Parlement, sur nos positions". La porte n'est donc pas fermée au MoDem, à condition que les centristes s'alignent sur les mesures
socialistes.
"ON VERRA PLUS TARD"
Mais plusieurs responsables semblent déjà préparer l'avenir. Le ministre de l'agriculture, Stéphane Le Foll, proche du chef de l'Etat, indique par exemple que la
participation gouvernementale du MoDem "ne se pose pas encore". "On verra ça plus tard", ajoute un autre poids lourd. "Rien ne démontre, aujourd'hui, qu'on ait besoin demain du MoDem", estime Luc
Carvounas, nouveau secrétaire national du PS aux relations extérieures.
D'autres prennent carrément date contre une évolution qu'ils condamnent d'avance, comme Benoît Hamon, classé à gauche dans le parti. "Je ne crois pas à un
renversement d'alliance, mais si jamais il devait s'envisager, comptez sur moi pour m'y opposer", prévient le ministre délégué à l'économie sociale et solidaire.
http://www.lemonde.fr/politique/article/2012/11/20/au-ps-la-tentation-d-une-alliance-avec-le-centre-alarme-l-aile-gauche_1793125_823448.html