
Comment réagissez-vous à la démission de Corinne Lepage ?
Elle est libre de faire ce qu’elle veut, mais elle aurait dû le faire plus tôt, ou au moins se mettre en retrait pendant la campagne des régionales : elle a pris du temps d’antenne au Modem et a
brouillé notre message. Elle n’est bien sûr pas responsable de notre score médiocre, mais elle a sérieusement pollué l’ambiance générale. Quand on est vice-président d’un parti, il vaut le mieux
soutenir que le critiquer. Depuis début septembre, Corinne Lepage n’a participé à aucune instance du mouvement démocrate. Quoi qu’on pense de la façon dont il est dirigé, l’expression publique au
Modem est totalement libre. Si on a envie de dire des choses dans un parti politique, on peut certes le faire dans la presse, mais on peut aussi le faire dans les phases publiques, comme les
universités d’été de la grande Motte ou le congrès d’Arras.
Son départ est un coup dur pour le Modem ?
Je ne vois pas plus gros coup dur que le résultat du Modem à ces élections. Après, le fait que des gens démissionnent est dommageable, surtout quand il s’agit d’un cofondateur. Mais à un moment
donné, il faut que les choses se clarifient. Qu’il y ait dans une formation jeune, nouvelle, des gens qui soient déçus par rapport à tel mode de fonctionnement, telle ou telle stratégie, ça me
semble extrêmement naturel.
Pour Corinne Lepage, "l’obsession présidentielle" de François Bayrou est responsable des déboires du Modem. Quel est votre sentiment ?
Depuis le départ, c’est un secret de polichinelle : oui, François Bayrou est candidat aux présidentielles. Le fait de répéter qu’il est bizarre que ce soit central dans ce qu’il fait est une
lapalissade. Evidemment, c’est ce qu’il a dans la tête, comme beaucoup d’autres. Pour moi, ce qui a particulièrement plombé le Modem, c’est l’erreur faite par François Bayrou, qu’on a réglé très
vite après, d’attaquer Daniel Cohn-Bendit lors du débat des européennes sur France 2. Ça a déçu, désarçonné un certain nombre de nos sympathisants, qui appréciaient le côté démocrate,
écolo, qui bouge les lignes, représenté par le Modem.
Pour vous, la responsabilité est collective dans l’échec de dimanche ?
Bien évidemment. Le choix de la stratégie d’autonomie a été voté par toutes les instances du parti. Après, on suit la ligne.
Le positionnement ni droite ni gauche du Modem, n’est-il pas mal compris par les électeurs?
Si on suit ce que j’ai fait avec Marielle de Sarnez et la direction du Modem, l’opération avec Daniel Cohn-Bendit, Vincent Peillon et François Rebsamen, on ne peut pas dire que c’est un
positionnement ni droite ni gauche. C’est un positionnement qui bouge les lignes. Ce n’est pas qu’on est à gauche, c’est qu’on est prêt à travailler l’alternative politique avec tous ceux qui
pensent que le sarkozysme anciennement triomphant, l’hégémonie UMP, ne sont pas bons pour la France et la République. Le Modem a pour velléité, et c’est la difficulté, de se positionner comme le
parti démocrate du XXIe siècle, qui casse les vielles alliances. Je suis d’ailleurs de ceux qui pensent que l’union de la gauche telle qu’elle est bâtie aujourd’hui a très peu de chance de gagner
la présidentielle. Il faut l’élargir.
François Bayrou est-il toujours présidentiable ?
Si j’en crois les sondages sur 2012 réalisés avant les régionales, il me semble que oui. Il y a de toute façon une terrible déconnexion, due à la présidentialisation générale du pays, entre le
vote par rapport aux partis politiques et le vote par rapport aux individus aux présidentielles.
Après, à quelle hauteur François Bayrou va se retrouver dans deux semaines quand il y aura un nouveau sondage? Je n’en sais rien. C’est la même chose pour les deux autres perdants des régionales,
Nicolas Sarkozy et Olivier Besancenot.
Avec très peu d’élus locaux et ce score de 4% aux régionales, le Modem ne sera pas gravement handicapé pour la présidentielle ?
Je n’en sais rien. Je préférerais bien sûr qu’on est plein d’élus, c’est d’ailleurs la fonction d’un parti politique. Mais la logique dans laquelle nous nous retrouvons sur l’espace démocrate, et
cette nécessité dans ce pays d’avoir des paroles neuves, un peu plus lucides, je ne les vois que chez François Bayrou.
http://www.metrofrance.com/info/jean-luc-bennahmias-corinne-lepage-aurait-du-demissionner-plus-tot/pjcq!QP@v3nA9o3HXoOsF395ZxQ/index.xml