Bayrou : Ce que je crois
Comme Mitterrand et Chirac avant lui, François Bayrou tente sa chance pour la troisième fois à l’élection présidentielle. Avec l’intime conviction d’être le seul à pouvoir rassembler, en 2012, les meilleurs de chaque camp.
Il sait bien que la fenêtre de tir qu’il discerne pour redresser la France – « Cette urgence qui, dit-il, est le temps pendant lequel il est encore possible d’agir » – a quelque chose à voir avec son propre destin. Mais il ne présente, curieusement, aucun signe de fébrilité. Détendu comme rarement il l’avait été depuis cette année 2007 qui le vit passer, sans préavis, du statut de troisième homme de l’élection présidentielle à celui de proscrit dont il était de bon ton de railler la solitude (« Il l’a bien cherché ! »), François Bayrou partage avec les paysans de son Béarn natal la tranquille certitude de savoir, avant les autres, quel temps il fera. Est-ce cette fameuse croyance en son étoile, que ses anciens amis, ralliés à Nicolas Sarkozy, assimilent volontiers à du “mysticisme” ? Même ses adversaires en conviennent : qui, sinon lui, a parlé le premier, en 2007, du poids croissant de la dette, quand d’autres, euphoriques, prônaient encore l’instauration de subprimes à la française ? Qui, en dehors de lui, a osé citer en exemple, ne serait-ce qu’une fois, la politique du socialiste allemand Gerhard Schröder qui, pour sauver son pays du déclassement, lui imposa une cure de rigueur sans précédent, en dépit de la défaite électorale qu’il risquait… et qu’il récolta ?
Deux ans après Abus de pouvoir, procès en règle de la politique et du style de Nicolas Sarkozy, Bayrou quitte désormais la critique pour la proposition. Avec 2012, état d’urgence (Plon), il dresse, en un peu plus de 150 pages, les grandes lignes du redressement qu’il appelle de ses voeux. Hervé Morin et Jean-Louis Borloo, qui ont rompu avec Sarkozy, l’accusent-ils de s’en rapprocher, au motif qu’il n’en fait plus sa cible principale ? Il rit : « C’est eux qui ont un problème avec Sarkozy, pas moi ! Ils ont été ses ministres et ne se sont mis à le critiquer qu’après avoir compris que ni l’un ni l’autre ne serait son premier ministre. Et ils me reprochent, à moi, d’être complaisant ? Je suis comme en 2007 : libre. Libre de le désapprouver, et je ne m’en prive pas. Et libre de l’approuver, par exemple sur la règle d’or d’équilibre budgétaire, ou l’intervention en Libye, que j’ai soutenues. » Bayrou a-t-il, du coup, gagné en sérénité ? Il ne récuse pas le terme. « En 2007, j’étais en guerre, en colère qu’on refuse de voir les nuages qui s’amoncelaient. Aujourd’hui que l’orage a éclaté, il n’y a plus à discuter, il faut agir. Et de droite, comme de gauche, toutes les bonnes volontés sont les bienvenues… Le défi est enthousiasmant ».