Constats :
Nous sommes convaincus que l’apprentissage est une voie d’excellence.
Il suffit de regarder chez nos voisins proches, l’Allemagne, la Suisse, pour se convaincre de la nécessité absolue de valoriser, autant que faire se peut, l’apprentissage comme filière de réussite et d’épanouissement professionnel. Rappelons que plus de 70% des apprentis trouvent un emploi dans les 7 mois suivant la fin de leur formation
Prenons l’exemple de la Suisse où la moitié des membres du Gouvernement a suivi cette filière : un chômage des jeunes à 7% contre 25% en France ; une main d’œuvre hautement qualifiée qui assure, depuis dix ans à la Suisse la première place du classement des leaders mondiaux de l’innovation ; et ce, grâce à la place décisive de l’apprentissage dans le système de formation, avec deux collégiens sur trois qui choisissent d’être apprenti en entreprise dans le cadre d’une formation duale.
C’est cette dynamique positive qui doit nous inspirer.
Quelques chiffres :
En 2014 on dénombrait près de 100 000 jeunes apprentis en Île-de-France, dont environ 85% en CFA et 15% dans des dispositifs d’accès à l’apprentissage et d’initiation aux métiers en alternance. Mais ce chiffre subit une tendance baissière, à l’instar de ce qui se passe en France, où l’objectif des 500 000 apprentis visé par le Gouvernement est loin d’être atteint.
On observe une baisse continue du nombre d’apprentis formés en niveau IV et V (le plus bas niveau : bac pro CAP).
29% des apprentis se forment à Paris, 28% en petite couronne, 43% en grande couronne.
Il existe 163 CFA gérés par 140 organismes gestionnaires, et 600 sites de formation.
Seules 3% des entreprises prennent des apprentis, dont 78% sont des entreprises de moins de 10 salariés.
Les freins au développement de l’apprentissage, selon les employeurs :
- « embaucher un alternant, c'est parier sur l'avenir en acceptant de le former et in fine de l'embaucher. Or, aujourd'hui, les PME ne prennent aucun risque ;
- rapporté au temps de travail passé dans l'entreprise, un alternant coûte quatre fois plus qu'un stagiaire qui, lui, est embauché à temps plein ;
- la réforme perpétuelle : plus personne n'arrive à s'y retrouver avec le yoyo des réformes. Ex : en 2013, le gouvernement Ayrault a raboté de 500 millions le budget dédié à l'apprentissage, avant de recréer un an plus tard un nouveau régime d'aide ;
- la complexité des flux de financement ;
- la paperasserie : « Entre le choix du candidat, la constitution du dossier d'apprentissage et le recensement des outils auprès de l'inspection du travail lorsque l'apprenti a moins de 16 ans, le processus demande du temps et de l'énergie. Cela représente un mois et demi de travail pour moi, compte un chef d’entreprise. »
- Le manque d’information : selon un sondage réalisé par l'Observatoire de la pédagogie et des métiers de demain, 40% des entrepreneurs sondés se disent insuffisamment informés :
- des formations inadaptées : la déconnexion avec les besoins de l'entreprise et le travail exigé en situation réelle est souvent pointée du doigt par les employeurs. «À l'école, les apprentis apprennent à plâtrer et à peindre dans des box de 3 mètres sur 2. C'est bien pour démarrer, mais complètement insuffisant pour apprendre le métier». «Comme la peinture coûte trop cher, les apprentis ne peignent jamais en classe». Le carrossier déplore que le centre de formation le plus proche de chez lui «n'ait que du matériel vieillissant » ;
- un contrat d’apprentissage trop rigide : notamment période d’essai trop courte ;
- temps scolaire et monde du travail : “Il existe un décalage entre le rythme de l'alternance, souvent calqué sur l'année scolaire, et nos besoins. Du coup, il est fréquent qu'un jeune démarre une mission sans jamais pouvoir la terminer. On finit par ne lui confier que des tâches quotidiennes”.
Nous voulons que la Région Île de France devienne la meilleure région pour l’apprentissage, et pour cela, nous voulons multiplier par trois en 5 ans le nombre d’apprentis. Il n’y a aucune raison pour que nous ayons trois fois moins d’apprentis qu’une région de population équivalente en Allemagne, par exemple la Bavière ! Il faut lever les blocages et c’est une responsabilité de la région.
Propositions
Nous veillerons à ce que l’offre de formation soit en adéquation avec les besoins de l’économie. Pour cela, nous intégrerons de manière plus systématique les 18 chefs d’entreprise dans la définition de l’offre de formation. L’objectif est double puisque cela leur permettra de mieux appréhender l’intérêt de l’apprentissage et donc les incitera à avoir davantage recours à ce mode de formation.
Nous expérimenterons des circuits courts en personnalisant plus les parcours pour les faire correspondre au projet professionnel de l’apprenti.
Nous aiderons les structures de formation afin qu’ils bénéficient d’un nombre conséquent de développeurs de l’apprentissage. Aujourd’hui, cette fonction essentielle est menacée par l’incertitude quant au soutien financier de la région. Leur mission : rechercher des apprentis, des entreprises et de les mettre en relation est pourtant essentielle.
Les aides régionales seront mieux réparties et calculées sur le coût réel de la formation alors qu’aujourd’hui, les Chambres des Métiers forment 30% des élèves et ne touchent que 3% de la taxe d’apprentissage. Nous orienterons nos efforts sur les formations de niveau IV (Bac Pro, BP) et V (CAP, BEP).
Nous ferons en sorte que les apprentis puissent bénéficier des services équivalents à ceux dont bénéficient les étudiants, notamment en termes de logement. Aujourd’hui les logements CROUS sont fermés aux apprentis alors qu’ils doivent souvent trouver deux solutions de logement : une pour les périodes où ils sont en entreprise, une autre pour les périodes de formation.
Avec les dernières réformes de l’apprentissage et l’augmentation de la part versée aux apprentis, employer des apprentis est devenu moins intéressant, notamment pour les petites entreprises qui doivent leur fournir une formation et se plier à un certain nombre de contraintes tout en supportant un coût proche de celui d’un employé au SMIC. Nous inciterons les entreprises de moins de 11 salariés à recourir à l’apprentissage en augmentant la prime régionale aux employeurs d’apprentis que la Région Île-de-France a fixée à son niveau le plus bas.
Nous proposerons aux entreprises et aux apprentis un guichet unique afin d’accompagner les entreprises et les jeunes. Ce sera une mise en œuvre concrète de la loi du 5 mars 2014 qui a fait des régions de véritables autorités organisatrices en matière de formation professionnelle.
Nous mettrons en place une plateforme internet afin que les jeunes puissent accéder en une seule recherche à l'ensemble des offres de stages.
L’accent sera mis sur le recrutement des jeunes des quartiers en difficulté et des jeunes sortis tôt du milieu scolaire.
Nous rendrons obligatoire « une découverte de l’apprentissage» dans les lycées.
Nous conduirons une réflexion sur le travail scolaire à distance afin de rendre mieux compatible, temps scolaire et monde du travail.
Nous nous inspirerons de l’idée allemande des ponts qui permet à tout apprenti de bifurquer vers l’enseignement généraliste et à tout élève en enseignement généraliste de bifurquer vers l’apprentissage, avec un droit à l’essai et un droit au retour. Autre élément : les entreprises qui prennent des apprentis peuvent faire des échanges. Cela permet à un jeune de découvrir la variété des métiers d’une même branche, et à l’entreprise de bénéficier de la dynamique de connaissance apportée par ce jeune.
Nous renforcerons l'accompagnement des apprentis les moins qualifiés (niveau BEP et Bac pro) pour limiter les taux de rupture, très présents dans cette tranche de la population (22% dans les cursus de niveau V) à l’aide des tutorats externes.
Nous offrirons aux entreprises la possibilité de s'associer pour accueillir ensemble un apprenti. En Allemagne, le modèle de la formation dite « en association » permet à plusieurs sociétés de recruter les jeunes et de coordonner ensemble leur apprentissage.
Nous proposerons la création d’un cadre européen pour l ‘apprentissage qui permette de développer des initiatives avec les régions d’Europe pour promouvoir la mobilité des apprentis
Nous développerons la formation tout au long de la vie. Aujourd’hui, comme le souligne la Cour des Comptes, la région fait trop peu de place à la formation continue dans son plan régional de développement des formations. Or l’économie évolue rapidement et les secteurs créateurs d’emploi demain ne sont pas les mêmes qu’hier. Il est important de permettre à chacun d’évoluer professionnellement et de favoriser les reconversions et mobilités dans l’emploi.